» Cette loi du plus fort est insupportable »

pingouin.jpg

Roman, la vingtaine, étudiant en histoire, débarque au bar un peu trop tôt pour un lundi matin. Il a besoin d’un petit café pour trouver l’inspiration et nous parler de Nuit debout, ce mouvement qui a pris d’assaut toutes les grandes et moyenne villes françaises, depuis fin mars. 

 

«  Au début, j’y suis allé par curiosité. J’avais adhéré au mouvement Occupy, et j’ai été un anonymous clermontois. Et depuis, j’y vais régulièrement. » Roman  n’en est pas à son premier coup d’essai, concernant le militantisme et l’engagement citoyen. Pour ce jeune étudiant, la prise de parole citoyenne est nécessaire au débat démocratique. il veut que la structure politique change, qu’elle soit plus horizontale. «  Mais Occupy ça a foiré, nous n’étions pas assez nombreux. A clermont, c’est toujours compliqué, nous ne sommes jamais moteur, mais là je me dis avec l’impulsion nationale, on arrivera peut-être à quelque chose. » Il le dit lui-même, ce genre de mouvements peut s’épuiser facilement à cause de jeu d’égo, alors cette fois, les citoyens semblent vigilants. Pour cet adepte à la démocratie directe, à l’autogestion, il faut désormais lutter pour une déprofessionalisation de la politique, pour la décroissance et la désobeissance.  » Trop de casse avec tout ça! » Il n’est d’ailleurs affilié à aucun parti, se revendiquerait plutôt du côté de l’anarchisme  » mais non-violent, les casseurs, les  » A bas les flics » tres peu pour moi! » Il n’a voté qu’une fois, ça n’a servi à rien, on ne l’y reprendra pas! «  Dans ma société idéale, on n’a plus de capitalisme, ni de productivisme, la course argent-temps-travail n’existe plus. Je suis pour la désargence, pour qu’on arrête de consommer bêtement... » 

Alors à Nuit Debout, il a trouvé des valeurs qui lui collent à la peau. «  Nous y trouvons des militants associatifs, politiques, syndicaux,mais surtout des citoyens, des étudiants, des paysans, des chômeurs, et des travailleurs. Tout le monde peut s’exprimer, car nous avons une envie commune: construire en dehors du système. » 

En un mois, Nuit Debout Clermont a organisé des diffusions de films tels que Merci Patron de François Ruffin ou Je lutte donc je suis de Yannis Youlountas, Bernard Friot est venu présenter son concept de salaire à vie,  » Même Filoche est venu nous détricoter la loi travail. » 

 

Car tout part de là: une révolte contre cette Loi El Khomri .  » C’est notre première revendication: le retrait pur et simple de cette loi. Et puis, nous voulons lutter contre les corruptions et évasions fiscales et revenir dans une vraie démocratie. »  Nuit debout a d’ailleurs organisé une  » manif de riches » à la BNP Paribas, un petit clin d’oeil bon enfant, jeudi dernier. 

Mais Nuit Debout Clermont-Ferrand a rencontré des heurts, ce week-end. vendredi soir, le mouvement s’est invité au Conseil municipal afin de demander l’autorisation de pouvoir rester sur la place de Jaude ( Leur installation a été évacuée le vendredi après-midi). Malheureusement, les discussions ont été sans succès et la police est intervenue afin de faire partir les militants.  » Une quarantaine de flics est venue, la majorité était cool, mais une dizaine nous a littéralement agressés avec des matraques télescopiques, des filles se sont faites traiter de  » sale pute », et ils étaient trop armés. On peut voir sur les vidéos que nous avons prises, qu’ils ont des tasers! Ils nous ont enfumés de gaz lacrymo, c’était d’une violence indigne. Ca a fini de creuser le fossé entre nous et les élus. D’ailleurs, un des nôtres, Guillaume Vimont siegeait au conseil municipal sous l’étiquette Europe Ecologie Les Verts, il a décidé ce matin de se retirer de son parti. De plus, il a été démis de ses fonctions par le maire pour son soutien à Nuit Debout. » 

 

Malgré ces turbulences, Roman reste optimiste, même si pour lui, le mouvement doit encore progresser:  » J’aimerais qu’on aille dans les quartiers, les hôpitaux, les centres d’hébergement, il faut investir d’autres lieux, donner la parole à d’autres pans de la population…Nous ne sommes pas assez représentatifs de ce qu’est le peuple dans toute sa diversité. et surtout il faut s’occuper des médias locaux, les remettre à leur place. Il faut inverser la tendance, ce sont eux qui décident ce qu’est notre mouvement. Ils communiquent à notre place. ce n’est pas leur rôle. il crée de la désinformation…Ces médias-là fotn aussi partie des choses à changer dasn notre société. Ils se donnent trop de puovoir. Ils nous filment et interprètent nos propos….Il faut qu’on arrête les interviews avec eux, et que l’on crée notre propre média ou que l’on travaille avec les médias indépendants et alternatifs... » 

 

Roman finit son café, il regarde son portable, les copains l’appellent, un des leurs passent en comparution immédiate à 13H30. On lui reproche des violences sur un des membres de la police. Ca l’agace Roman,  » Lui il va payer, et ceux qui nous ont insultés, agressés, envoyé des gaz et des coups de taser, ceux-là ne risquent rien. Pourtant nous étions nombreux à avoir des bleus et des bosses vendredi soir….Tu vois c’est ça qui ne va pas dans cette société, cette éternelle loi du plus fort... » 

 

Eloïse Lebourg

Nos actionnaires, c'est vous.

Aidez-nous à rester gratuit, indépendant et sans pub :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

nos derniers articles
Cet article vous a plu ?

Soutenez le Cactus !

Le journalisme a un coût, et le Cactus dépend de vous pour sa survie. Il suffit d’un clic pour soutenir la presse indépendante de votre région. Tous les dons sont déductibles de vos impôts à hauteur de 66% : un don de 50€ ne vous coûte ainsi que 17€.