Radio MNE, la radio de Mulhouse qui n’a pas froid aux yeux

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Mediacoop fait partie de la Coordination Permanente des Medias Libres qui regroupe plus de 80 médias en soif d’indépendance. Comme bonne résolution pour l’année 2018, on a décidé de vous faire connaître ceux avec lesquels on lutte au quotidien pour une liberté de l’information. Cette semaine, Radio MNE, un ovni dans le monde des radios associatives. 

 

Luc avait mis en place une radio en plein coeur d’un bar « Chez Arlette » lors des dernières rencontres des médias libres, à Meymac. Luc est capable de prendre l’antenne à minuit pour parler des lanceurs d’alerte. Luc fait de l’éducation aux médias et part interroger les eurodéputés à Bruxelles. Il a l’accent mulhousien, et le bérêt vissé sur la tête. Il aime la bière, et après avoir fait un bac pro photo et un CAP Menuiserie, a réparé une porte pour Radio MNE. Une porte qu’il a définitivement ouverte pour, quelques années plus tard, devenir responsable d’antenne de la seule radio associative de la capitale du monde…de l’Est! 

D’abord, ce fut une association Old School, créée en 2000 pour aider le groupe de rap « la vieille école ». En 2005, le groupe fait une pause et l’association se développe alors sur d’autres plans. Des vieux de la vieille, de l’époque de la libéralisation des ondes sous Mitterrand créent une webradio WNE ( Warum Net Experience) inspirés par leurs expériences à Fréquence Mulhouse. En 2009, Nicolas, aujourd’hui délégué général de Radio Campus, devient salarié de la webradio et lui donne une autre ampleur, notamment grâce à un marathon radiophonique légendaire d’une semaine. Il développe un pôle Education aux médias et la radio prend son rôle de médias de proximité à bras-le-corps. 

En 2014, la webradio entre sur la bande FM, avec une fréquence temporaire. Grâce à un crowdfunding, en 10 jous, la radio récolte 5000 euros pour se payer un émetteur. «  Les mulhousiens avaient envie de leur radio alternative et se sont emparés du projet » explique Luc. «  Nous avons eu du mal à être sur la FM, notre proximité avec la Suisse et l’Allemagne ne nous a pas aidés. » Tous les 9 mois, la radio doit donc refaire une demande de fréquence. Mais à partir de cette date, la radio connaît une « évolution folle« , avec un développement du réseau et une ligne éditoriale plus claire. 

Malheureusement, en 2017, la fin des contrats aidés vient troubler cette ascension fulgurante. » Avant, nous étions 13 salariés dont 7 contrats aidés. Aujourd’hui, nous en perdons 5. Et c’est une casse sociale à laquelle nous assistons impuissants. Parmi les salariés qui ont perdu leur emploi, deux personnes de plus de 55 ans, handicapé. Et je dois témoigner du fait que nos contrats aidés ont trouvé chez nous une expérience qui leur a servi de tremplin. Certains ne savaient pas lire et sont aujourd »hui journalistes! » Luc parle de gros gâchis. L’association a reçu un agrément pour former des services civiques et des étudiants Erasmus. Mais, avec la chute du nombre de salariés, ils vont devoir revoir à la baisse le recrutement des services volontaires européens  qu’ils formaient. Heureusement, l’équipe peut compter sur la centaine de bénévoles qui fourmillent autour de la grille des programmes. «  Le plus dur c’est que de 2014 à 2017, nous avons fait notre ascension et sommes arrivés à quelques mètres du sommet, et pile à ce moment, Macron vient nous marcher sur les doigts et nous casser les reins… » La radio n’a donc pas d’autres choix que de revoir ses objectifs à la baisse: moins d’organisation de festivals.  » On fera plus de prestations, on se tapera à faire plus de devis, et on se fera payer pour faire le portrait du coiffeur de 80 ans du coin… » Radio MNE a pourtant de la ressource et a fait le pari de la Radio Numérique Terrestre ( NDLR: l’équivalent de la TNT pour le monde radiophonique qui demande un changement de matériel de réception comme les autoradios par exemple) .  » Nous nous sommes associés à 12 radios du coin pour créer notre propre multiplex. Ca nous apportera des aides du ministère, notamment le Fonds de Soutien à l’Expression Radiophonique auquel nous n’avons pas le droit puisque nous n’avons qu’une fréquence temporaire. » La radio peut aussi compter sur son fort investissement en terme d’éducation aux médias et de sa propre agence  de communication sociale et solidaire. Entre autre projet, MNE aimerait se lancer dans la vidéo grâce à du matériel qu’ils ont récupéré.  » Et nous avons créée un appel à dons: 1 euro par mois. Si les 6500 personnes qui nous suivent donnent un euro chaque mois, nous pouvons financer 2 postes! » 

Pour Luc, donc pas question de désespérer. Radio MNE est loin d’être morte.  » Radio MNE a raison d’exister, c’est après un accident du travail en tant que menuisier, déprimé que je suis allé réparer leur porte, je suis devenu bénévole et aujourd’hui je suis responsable d’antenne. Comme quoi, radio MNE fait des miracles… » 

 

Pour les aider: https://www.helloasso.com/associations/association-old-school/collectes/un-studio-fm-mobile-radio-mne-en-bas-de-chez-vous-du-drouot-au-sungdau

 

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